Mettre la sobriété énergétique au service de la solidarité
Le 6 Octobre 2022, Alain Grandjean et Robin Girard, membres de notre comité scientifique publiaient dans les Echos une tribune ouvrant la voie à la solidarité énergétique. Nous en reproduisons le texte ici !
La sobriété énergétique est un levier majeur à court terme pour répondre à la crise de cet hiver comme à long terme pour atteindre la neutralité carbone. Mais il faut mettre en oeuvre des mesures d’incitation, estiment Patrick Criqui, Robin Girard, et Alain Grandjean.
La France va entrer l’hiver prochain dans une situation sans précédent depuis 1956 : sauf températures très clémentes, les pouvoirs publics devront mettre en place des mesures coercitives pour réduire la consommation d’électricité des Français.
Les prix de marché de l’électricité pour l’hiver prochain sont à des niveaux jamais atteints, plus de 1.000 euros par MWh, soit 10 fois supérieurs aux prix pré-crise, ce qui reflète le coût que sont prêts à payer certains consommateurs, notamment industriels, pour éviter une rupture d’approvisionnement en électricité.
L'énergie ne sera plus jamais abondante
A contrario, le tarif réglementé pour les particuliers, calculé à partir du coût moyen de production et limité par les mesures dites de “bouclier tarifaire“, a peu augmenté : +7 % entre 2020 et 2022.
Qu’on le veuille ou non, l’énergie ne sera plus jamais abondante. Les études de RTE et de l’Ademe notamment montrent que la neutralité carbone ne pourra être atteinte sans une forte baisse de la demande d’énergie. Tout d’abord grâce à une meilleure efficacité énergétique, mais son déploiement restera limité d’ici l’hiver.
Également grâce à la sobriété énergétique : si 80 % des foyers limitaient leur consigne de chauffage à 19 °C, cela économiserait 12 TWh d’électricité, soit l’équivalent de 5 réacteurs nucléaires sur l’hiver. Et les gisements d’économie d’électricité sont aussi importants pour les usages d’eau chaude sanitaire (12 TWh) et électrodomestiques (20 TWh).
Économie de 9 milliards d'euros
Pour répondre à la demande d’électricité, les centrales au gaz devront fonctionner une grande partie de l’hiver. Toute baisse de la consommation électrique permettra de réduire les importations de gaz. Sur 2022, le coût annuel des importations de gaz devrait s’envoler à plus de 50 milliards d’euros. Si les foyers français exploitaient pleinement leur gisement de sobriété, cela représenterait une économie de 9 milliards d’euros, de quoi créer de nombreux emplois.
Hors les précaires énergétiques, déjà contraints de limiter leur consommation, un foyer suivant des bonnes pratiques peut réduire sa consommation d’électricité de 10 % à 20 %. Cela représente une économie moyenne de 100 euros à 200 euros sur sa facture.
Le fournisseur quant à lui peut, selon les cas, éviter des achats très coûteux sur le marché de gros, ou, s’il a déjà assuré son approvisionnement, valoriser l’électricité économisée à un prix 10 fois supérieur à celui proposé aux particuliers. L’économie pour le fournisseur représente entre 500 euros et 1.000 euros par foyer sur l’hiver, et plus encore si les baisses de consommation sont plus marquées lors des heures de tension sur le système électrique.
Précarité énergétique
Se pose alors la question de la redistribution de cette économie aux consommateurs. À titre d’exemple, TotalEnergies propose une prime de 120 euros à ses clients s’ils baissent leur consommation de 20 % par rapport à l’hiver précédent. Ce montant est-il à la mesure des enjeux ? Faut-il rémunérer directement les clients pour leur effort de sobriété et ainsi creuser l’écart entre ceux qui peuvent facilement baisser leur consommation et ceux qui sont déjà incapables de se chauffer correctement ?
Ne faudrait-il pas plutôt demander aux fournisseurs de reverser une partie substantielle de ces économies pour financer des actions d’aide à la transition pour les précaires énergétiques (rénovations, subventions aux équipements efficaces…) ?
La sobriété énergétique est un levier majeur à court terme pour répondre à la crise de cet hiver comme à long terme pour atteindre la neutralité carbone. Mais un effort de communication ne sera pas suffisant pour qu’elle se développe à grande échelle. Il faut de forts éléments d’incitation. Et quelle meilleure motivation que celle d’une action concrète de solidarité énergétique ?
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